Aikido
Je choisis de réécrire cette page visité auparavant pas loin de 2000 fois. Sans doute, car ma perception de l'aikido a changé autant que j'ai changé par l'aiki. Cette page, ce site aurait pu évolué à la façon d'un blog tel qu'on peux en trouver de nombreux exemplaires sur la toile, mais je ne l'ai pas fait pour des raisons autant pratique que symbolique. Réecrire un point de vue après presque 15 ans de pratique me semble donc un point, un moment intéressant autant pour moi que pour vous lecteur, pour la cogitation globale. L'Ancienne Version reste disponible.
Impressions sur l'Aikido
Après 15 années de pratique, que retenir ? Que voir ? Bien évidemment, tous cela serait personnel à chaqu'un. Grade passés, stages, tampons de licence, tensions, douleurs, absences... Ma première rencontre avec cet art martial se fît « par hasard », cela a coïncidé avec mon arrivée sur Saint Brieuc où je souhaitai pratiquer un art martial. En tête de la liste du Minitel se trouvait le dit art. Et me rendant au Dojo pour la première, quelques enfants ou adolescents se chahutaient gentiment. Après autorisation du professeur, vêtu d'un jogging un cours puis deux, puis trois cours passèrent. Le doute ne fut plus alors permis que l'aikido serait l'art martial que je pratiquerai. J'avais 10 ans.
Je me souviens des chahutages, des randoris lancés en fins de cours sur Bertrand. Du premier stage avec Toshiro Suga au mois de Janvier 1997 au cloître de saint Thégonnec où l'ordre de rangement des chaussures au bord du tatamis fut soulevé par les coup de pieds de Toshiro dans les chausses de ceux qui ne les avaient point rangés. Ce fut émotif, en plus du froid de ce stage d'hiver. Cet ordre de rangement qui ne m'a plus quitté. Par peur de Toshiro ? Par souci pratique ? Sans doute pour un peu de tous cela. Je n'ai bien sur plus peur de Toshiro !
Sans doute cette anecdote fut un des premiers accès à la notion de « Rei » de respect, d'étiquette qui bien sur est propre à tout les arts martiaux. Respecter un ordre pour arriver à une forme d'harmonie « Aï ». Par la suite, d'autres anecdotes ou conseils, regards se portèrent à l'ajout pour constituer cet ensemble. J'ai mis longtemps à comprendre ce que voulait dire « étiquette ». La forme ? Le fond ? L'idée ? L'ébauche ? On attribut à Ikkyu Sojun qu'un jour un moine passa au abords de son temple et demanda a le rencontrer lequel acquiesça. Et à peine assis, saisissant la tasse de thé, Ikkyu demanda : « de quel côté de la porte as-tu placé des zoris ? » « Je ne me souviens pas... » « Alors, comment veux tu être attentif au zen si tu chaqu'un de tes actes n'en n'ai pas imprégné ? ». L'Aïki doit sans doute commencer quand on débute par les zoris, et plus les années passent, plus le fait de se lever le matin devient proche en essence du salut, d'attention, de l'essence de la technique...etc.
A fur et à mesure des années, des techniques s'élaborèrent à la fois dans ma tête et au bout de mes mains. L'Aïki fut art martial par l'aspect physique, le souci de savoir faire une technique. Je me souviens encore des heures a s'entrainer avant ou après les cours, avec les listes de noms à apprendre par cœur. Sans doute aussi à force de répéter Ikkyo, Nikkyo... ukemi, irimi...entendre ces mots entraine une réaction instinctive. Les cours de philosophie pris en terminal littéraire m'ont apportés une définition de l'inconscient : au plus profond de soi se trouve des réflexes, des mouvements ou pensées non contrôlés, ce que le passé, le groupe, la famille nous a inculqués pour faire ce que de manière non contrôlé nous faisons. Sans doute à force de chuter, l'ukemi peux devenir la méthode de protection en cas d'attaque, l'atemi de défense en cas d'agression... Je penses que lorsqu'on débute la technique n'est qu'un aspect physique, lequel s'affine avec les années. L'ancien guide le débutant, la main de l'autre sans doute pour en montrer la substance, à cette différence du professeur/maître/enseignant/senseï/Dojo-Cho qui au travers de cette technique est en capacité de montrer en guidant la main, une idée.
Ce dernier paragraphe ouvre l'idée du maître et de sa perception. Encore une fois, revenons sur l'idée européenne de ce mot. Maître d'école, d'épée, de classe. Moine Zen, prêtre...sans doute quand nous parlons de maître sur un corps de métier nous en déduisons une capacité de réalisation non pas parfaite, mais dont la forme dégage certainement une logique, une beauté, une réalisation qui nous paraît à nous néophytes exceptionnelle. Les compagnons du tour de France en sont l'image d' Épinal. Pour moi qu'est ce un maître ? Difficile à répondre. Ayant suivis depuis 15 ans l'enseignement de Bertrand car son humain et sa technique m'ont enseignés plus qu'une façon de chuter (laquelle a été remis en cause au fur et à mesure des années), en un sens je me sens proche de lui, intimement. Depuis son départ, je me suis rendu compte à quel point la présence de maître Tamura fut essentielle, essentielle et profonde. Le voyant boire autant qu'être droit, souriant et sévère rien que le fait d'être, de marcher pouvait être un enseignement. Il était difficile voir impossible de le remettre en cause, réalisant sa charpente d'Aïki pour ensuite y habiter, y vivre (I- Aï). Avec le temps, aussi on finit par répéter les styles propres à certains, in consciemment je répète le style de Bertrand, qui est proche de celui de Sensei Tamura, en ajoutant bien sur diverses nuances. « Maître-mètre », l'homophone est intéressant en cela que la mesure devient un repaire, une unité de valeur afin de tracer quelque chose. Le maître permettant de tracer sa voie, de mesurer ses erreurs ou ses qualités. Perception sans doute plus vastement et plus profondément, en Soi de la Vérité. A chaque jour sans doute, sa profondeur de perception.
Qu'entends on par Harmonie ? Harmonie des couleurs dans une peinture ? dans une musique celle des notes qui se suivent ? Quand je danse, mon cerveau me dit harmonie avec ma ou mes partenaires c'est à dire me calquer au rythme de la musique pour qu'ensemble nous touchions à autre chose. J'aime beaucoup la mazurka, dance lente mais précise où le décalage où le fait d'être ensemble se voit assez vite. Il est évident qu'un musicien dirait qu'il s'agît de tempo entre les instruments, du chant sur des tonalités plus ou moins hautes...etc. En Aïkido, où cela se situe-t-il ? Encore une fois, je fais appel aux souvenirs. Je pense cette fois au Stage de Lesneven, j'étudiais Iriminage avec une personne, au bout d'un moment nous arrivions à ne plus nous marcher sur les pieds, puis il m'a semblé qu'autour de nous, que personne ne se marchait sur les pieds. Nous étions d'une certaine façon ensemble. Dans le même stage ou un autre stage (de Lesneven toujours) Maître Tamura avait montré une attaque Shomen au Bokkuto et une réponse en coupe par le côté. Ce que nous faisions d'un point de vue générale ne le satisfaisant pas, il nous proposa de pratiquer dans le même tempo que lui. C'est à dire que 300 personnes fassent la même chose que lui. Puis il prit la position de Tori et attaqua 300 Uke. Nous devions bien sur nous caler sur lui. Ces exemples à vaste échelle illustre de la difficulté d'être ensemble. Je crois que l'absence de blessures physiques ou morale, que la volonté de pratiquer sur le tatami ou en dehors dans l'esprit de non violence souhaitant voir une paix entre Soi et les autres par un ou des mouvements alors, on obtient une forme d'harmonie. Si l'on ajoute l'espace-temps (« timing » pour les amants de l'anglais!) adéquate, une certaine beauté peux se dégager d'une forme. N'a-t-on pas entendu souvent que l'Aïki n'était pas un art martial mais une dance ?
J'implique donc l'intégrité et le respect. Respect pour le lieu, pour moi, pour l'autre. Shisei.
Durant des années, je saluais sans intérêt le portrait du fondateur, endroit que l'on nomme Kamiza. Saluer, encore et encore. « Salue vieux ! » « Salue à toi ! » « Je reconnais votre présence par votre enseignement délivré par l'enseignant, je m'engage à la respecter en montant sur le tapis ». Quelques phrases que je pensais a voix basse. Vrai ? Fausses ? Sans doute à différents moments, elles pouvaient être ou l'un ou l'autre. Aujourd'hui, le kamiza pour moi est devenu le lieu des « Kamis » [Kami-Za]. C'est à dire l'endroit où siège les Dieux, l'esprit du lieu. Dans certains dojos où est pratiqué le Iwama Ryu, en plus du portrait du fondateur est venu s'ajouter celui de Saito Morihiro. Dans un premier temps, j'ai cru que cette manifestation d'attachement des élèves a leur maître à cet endroit pouvait être déplacé, mais dès lors que maître Tamura nous a quitté, je l'a conçoit mieux. Nos rapports avec l'enseignement du fondateur se trouvait logiquement dans les mains de maître Tamura et aujourd'hui dans les nôtres puisque chaqu'un de nous, à notre échelle sommes ses héritiers. Je ne dirais pas que Sensei est devenu un Kami au sens dieu ou divinité, mais il a sa place dans un espèce de panthéon (du souvenir sans doute). C'est pour en venir à ce point que j'ai utilisé ces périphrases, celui de la religion.
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L'aikido tel qu'il est vécu en France n'a rien de religieux ni au sens chrétien, musulman ou autres. Parfois maître Tamura récitait des mantras ou Saito sensei lors de ses venues ou dans quelques stages, mais l'aspect du rituel religieux s'est en général arrêté là. À force de lectures et de curiosité, je conçoit aujourd'hui le Budo dans son ensemble comme une entrée en religion. Je m'explique sur ce point : Religion vient de relier, « religare ». Nous avons un code d'honneur, des techniques, des habits en commun, un lieu de pratique. Nous ne prenons si le sacerdoce ni le veux de prier O'sensei 5 fois par jour, mais un forme d'attachement à sa personne, son art semble (encore une fois pour ma propre pratique) se dessiner. Un attachement à des règles d 'être issues du mode de vie Japonais, des formes de vivre de ce pays lointain. Le maître serait il un guru ? Deux mot encore bien différent l'un de l'autre, l'un français et l'autre de consonance hindous. Je ne prie personne de ces dénominatifs là. O 'Sensei était très religieux, de son vivant une calligraphie avait la place que aujourd'hui occupe son portrait. Parfois, on voit les deux. Il saluait les Kamis, puis en retour saluait les élèves qui le lui rendait. On peux faire du Budo son code de vie, son art de penser. Ce qui inclut sa façon de marcher, de respirer, de regarder, positionner la tête...etc
Ainsi, le Budo permettrai de relier au sein d'une même – disons le mot - famille un assez grand nombre de personnes pour ne pas dire l'humanité dans son ensemble. Et même si il pourrait paraître invraisemblable que les hommes arrêtent un jour de se battre, en tout cas le constater sur un Dojo et dans une vaste échelle, à titre d'Utopie, cela en vaut qu'en même le coup. Ce qui n'empêche naturellement pas d'avoir « un squelette dans son placard » ou « une épingle dans ses tongues ».
Pour terminer, quelques poèmes d'O Senseï :
Onokoro Ni Tokotashi Nashite Naka ni iku ai no kamae wa Yamaiko no michi |
Sur cette terre tenez vous debout droit comme un Dieu. Épanouissez en son centre, le chant de l'amour est le chemin de l'écho de la montagne ! |
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Aiki towa Tokeba mutsukashi Michi Naredo Arinomama naru Ame o meguri yo |
Aïki Une voie si difficile à comprendre Et pourtant aussi simple Que le cours naturel du ciel. |
Voici, mes impressions d'aujourd'hui sur l'Aïkido. Je serais bien curieux d'en discuter à plus vaste échelle...ou plutôt que se creuser la tête essayer pour une fois de bien faire Ikkyo:-)
Références (ou pas) :
Blog de Léo Tamaki
La série des Bandes Déssinnées « Kogaratsu »
L'essence de l'Aikido * Morihei Ueshiba par John Stevens
L'Art de la Paix * Morihei Ueshiba
Symboles du Bouddhisme Tibétain
Budo * Morihei Ueshiba
Étiquette et transmission * Tamura Nobuyoshi
Hokusai * Matthi Forrer
Musashi * William Scott Wilson
Nuages Fous * Ikkyu
L'Esprit de l'Aïkido * Ueshiba Kishomaru
Poésies * Frédérico Garcia Lorca
Canto General * Pablo Neruda
L'amour, l'Amant, l'Aimé * Hafez Shirazi
Budo * Michel Coquet
Iaido ou l'art de trancher l'égo * Michel Coquet
« L'art du Koto » * Eto Kimio (disque Vinyle)
« Après la pluie » et « Rêves »* Kurosawa Akira
2.5